vendredi 4 juillet 2008

LES GREVES DE 1953



L'année 1953 voit se constituer le treizième gouvernement de la IV° République, les gouvernements valsent au rythme des grèves et des conflits tunisiens, marocains ou indochinois. Cette même année 53, Brassens créé sa chanson "Pauvre Martin, Pauvre misère ..." ; les ouvriers tout comme les paysans se tuent à la tâche et la paie reste maigre.

Juillet 1953, ce sont trois mois de vacances qui s'ouvraient pour moi à la cité des Tellières. Mes parents étant rester amis avec la famille P.... dont l'une des filles était avec moi en sana, le père A.... avait d'ailleurs aider au déménagement - ils habitaient une cité identique à la nôtre au Petit Bois - un jour mes parents sont allés chez eux leur rendre visite et tandis que les adultes "discouraient", nous les enfants nous courions dans les allées du jardin, pieds nus en raison de la chaleur - mais n'est-ce-pas une chose que je défends maintenant à vous, petits enfants - et voilà que je tombais malencontreusement sur une pierre ardoise coupante qui bordait une allée ce qui m'occasionna une entaille profonde entre deux orteils. 


Le médecin m'avait interdit de marcher pendant un temps assez long et je restais souvent dans le jardin allongée sur un fauteuil en osier à l'ombre d'un immense prunier de mirabelles. Ce prunier fut rapidement sacrifié par mes parents car à la belle saison sur la cour en pierres-ardoise, ce n'était que marmelade de prunes et profusion de guêpes. Enfin, pour l'heure et sous son ombre, j'essayais de faire contre mauvaise fortune, bon cœur. 

Cependant, quand il fallait sortir et surtout, quand l'obligation se présentait maman me transportait sur le porte-bagage de son vélo.
Les fendeurs dans les cabanes "au jour"

Août 1953, il fait une chaleur étouffante, certains s'apprêtent à partir en vacances quand, soudain, une grève illimitée est lancée contre les mesures prévues par le gouvernement Laniel qui remettaient en cause les acquis obtenus à la Libération. Le gouvernement avait annoncé qu'il allait prendre toute une série de mesures afin de limiter les dépenses sociales : réforme de l'assurance sociale, suppression de milliers d'emplois dans la fonction publique et surtout : allongement de l'âge de la retraite (tiens, décidément, une réforme qui est toujours d'actualité....) La grève commence par les postiers et le 12 Août elle s'étend aux secteurs de la RATP, électricité, gaz et au mines. J'étais encore jeune à l'époque mais je me souviens que cette grève fut violente aux "Carrières". Le mois d'août 1953 sera chaud, très chaud avec des luttes très dures.


Je voyais les hélicoptères des gardes-mobiles tournoyer au-dessus de nos têtes et des puits des Carrières. La "paye" ne rentrait plus à la maison et maman recevait des ardoisières des bons de pommes de terre pour manger mais je ne me souviens pas d'avoir un seul jour dans ma vie souffert de la faim. La grève avait duré plus d'un mois et avait laissé les mineurs amers sur la fin. Je revois encore un ardoisier montrer le poing à l'endroit d'un hélicoptère de CRS qui tournait au-dessus de sa tête.

C'est une de ces journées chaudes du mois d'août qu'une ancienne voisine de la Pyramide choisit pour demander à maman de l'accompagner à Angers pour constituer le trousseau de son fils qui rentrait pensionnaire au Cours Complémentaire à Baugé.

A peine descendues du bus qui nous avait emmenées dans le centre-ville, nous avons été surprises par une manifestation violente de gardes-mobiles et de CRS contre la foule des manifestants principalement conduite par les ardoisiers de Trélazé et qui, chargée, courait dans tous les sens. 


Sur les pavés d'Angers, les galoches ouvrières résonnaient de colère, de la colère des "perreyeurs". Nous, par contre, nous nous sommes retrouvées au milieu des gaz lacrymogènes et toutes les trois avions eu très peur à tel point que nous avions dû trouver refuge à l'intérieur d'un magasin de confection en attendant que l'atmosphère soit un peu plus calme.
 


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