mardi 24 juin 2008

MAI 1968


En Mai 1968, la France figée dans sa réussite économique se réveille brutalement. C'est un mois de folie et de désordre pendant lequel la jeunesse s'autorisera toutes les audaces. Début 68, le Général de Gaulle est au pouvoir depuis dix ans. En réalité, les jeunes issus du baby-boum de l'après-guerre étouffent et s'ennuient.

Il suffira d'une étincelle allumée en mars par quelques étudiants gauchistes à Nanterre pour enflammer
tout le pays. En mai 68, le transistor collé à l'oreille, les français assistent ébahis au surgissement échevelé de la jeunesse. Un peut partout, on sèche les cours et on débat... le mouvement étant impulsé par la fièvre idéologique de quelques-uns : l'ennemi, c'est l'ordre. Le pouvoir, la police, les partis politiques, les syndicats vont vite être débordés par l'insolence, la créativité, la spontanéité et l'absence de stratégie du mouvement étudiant. Les travailleurs vont s'engouffrer dans la brèche ouverte par les étudiants et le 13 mai, dans le cadre d'une journée nationale de manifestations, il y a 8 millions de travailleurs en grève.

Je me souviens de la manif' à ANGERS : ENORME ! énorme concentration d'ouvriers, d'étudiants et d'employés du tertiaire réunis dans la fraternité devant la Bourse du Travail, place Imbach. On n'entend même pas les orateurs tellement il y a de déferlement de toutes sortes.

La manif' boulevard du Roi René : bien sûr, j'y étais, nous étions souvent assis sur la chaussée car l'on entendait dire que le début du cortège était déjà arrivé disloqué vers le boulevard Foch que la fin du cortège ne s'était pas encore ébranlé de la place Imbach.
Je me souviens de l'ambiance mémorable ! nous chantions sur l'air de "il était un petit navire" : IL ETAIT UN PREMIER MINISTRE QUI N'AVAIT JA-JA-JAMAIS TRAVAILLE .... Le premier ministre qui était la cible de l'époque et paix à son âme (G. POMPIDOU) avait sûrement beaucoup plus travaillé n'importe lequel d'entre-nous.

Il faut dire que depuis mon retour des vacances hollandaises, les employés de banque dont je faisais partie étions en grève, elle durera trois semaines et, chaque matin, nous étions réunis à la Bourse du Travail (désignés pour être "piquets de grève"). Le programme des journées était tout nouveau pour nous. Tout nouveau, tout beau, tout rose. Tous les jeunes nouvellement embauchés nous étions en permanence en effervescence, la tension restait vive. Les travailleurs occupaient les usines, et ce fut la grève à l'O.R.T.F. (télévision). On commençait à manquer de carburant et moi, plus de solexine à mettre dans mon solex : alors je rentre d'Angers à pied avec d'autres employés de banque et c'est dans la joie et la bonne humeur.
J'ai gardé le souvenir de cette période d'une ambiance extraordinaire, comme d'une grosse kermesse.

Les banques commençaient de leur côté à manquer d'argent liquide. C'est la "chienlit" dira De Gaulle : l'emploi ne s'est pourtant jamais si bien porté ; comme quoi, même en période de croissance, la vie est rarement simple comme un coup de fil.

Fin mai, le vent "tourne" et De Gaulle reprend le contrôle de la situation. Le 31 Mai, ce sont les gaullistes qui occupent le pavé : c'est la "Marseillaise" contre "l'Internationale" et le travail reprend progressivement.
(X)


Les manifestants gaullistes à ANGERS le 31 Mai 1968


Comme tout le monde, nous les jeunes de la BANQUE POPULAIRE reprenons le chemin de ... la banque et le patron, paternaliste, nous accueille tous dans le hall d'entrée en disant "grèvistes et non-grèvistes serrez-vous les mains...". Je m'en souviendrai toujours car cette phrase m'avait émue.

La Banque Populaire Anjou-Vendée 7, bld Foch à Angers (à gauche) elle a changé de nom et elle est devenue depuis Banque Populaire Bretagne Atlantique.



En Mai : la grève et en juin, c'est déjà les vacances alors avec une copine du Cours Seng-Réthoré, nous prenons pour la première fois l'avion pour nous rendre aux Baléares dans un club "branché" du style "club Med" : Non, mais des fois, que demande le Peuple ???


L'hôtel était situé dans une région un peu marécageuse du côté d'Alcudia entre la lagune et la mer. Il y avait beaucoup de jeunes de notre âge et, grisés par notre nouveau pouvoir d'achat - merci les accords de Grenelle - nous goûtons à tout avec voracité. Cependant, c'était encore le régime franquiste et les autorités de l'île nous avaient interdit de nous réunir en ville suite aux récents évènements en France et, en outre, le franc n'était plus échangé dans les banques mais c'était sans compter sur notre sens de la débrouillardise : OLE !


Aux Baléares en Juin 68 : trois semaines de grève en mai, trois semaines de vacances en juin :
Non, mais des fois, que demande le Peuple ???

MAI 2018 :

(X) A l'occasion du cinquantième anniversaire de ce qu'on a appelé les "Evènements de MAI 68" divers témoignages ont paru dans la presse régionale et nationale.
Suite à la publication de cet article dans mon blog via internet, j'ai été contactée en Avril 2018 par des journalistes du Courrier de l'Ouest pour apporter également mon témoignage et j'ai pu confirmer les impressions de ce que j'ai vécu à l'époque et qui sont reprises dans cet article.
Mon témoignage a fait l'objet d'une page complète dans l'édition du journal du dimanche 27 Mai 2018. Ce fut pour moi un petit honneur personnel et une grande satisfaction familiale. 

Merci au journaliste du Courrier de l'Ouest qui a permis cette parution et qui, sans le savoir, m'a permis de retrouver quatre couples d'anciens collègues de la banque où je travaillais à l'époque et que j'avais totalement perdus de vue. Comme quoi, quelquefois, grâce à internet et au journal local, le hasard fait bien les choses ...    






1 commentaire:

Tujacq a dit…

Christiane Choisnet : il me semble que nous étions dans le même cours chez Seng-Réthoré. Que deviens-tu ?
Jacques Turpin