jeudi 26 juin 2008

LES VACANCES A ARCACHON ET SUR LA COTE D'AZUR

 
J'adore lire et maman me permet d'acheter des livres de poche que je dévore et que j'échange avec les copines. Des étés entiers de lecture commencent à l'adolescence : le livre de poche, fantastique levier d'une lecture accessible à tous est partout : à l'école, à la récré, à la veillée : Mauriac, Giono, Cronin, Bazin furent parmi mes auteurs favoris. Sur la plage aussi, le roman d'été supporte tout : le sable qui s'incruste entre les feuilles, l'oubli quand la paupière se fait lourde . Il y eut l'été de mes treize ans marqué par mon incursion prolongée à Jalna (Canada). Les années cinquante furent au sein de ce demi-siècle la décennie la plus féconde en best-sellers. A 15 ans, ce fut l'été Zola et des Rougon-Macquart car le roman d'été se conjuguait alors en série et à la rentrée, les livres aux couvertures écornées se réfugient aux rayons souvenirs dans un coin du grenier. Les romans de mes étés, eux, restent enfouis au creux de ma mémoire. L'époque reste vouée à la jeunesse : Françoise Sagan arrive avec son fameux parfum de l'air du temps "Bonjour Tristesse".

En attendant, cette-année-là, en 1961, mes parents n'ont pas du tout envie d'être tristes, nous partons en vacances près d'Arcachon derrière la dune du Pyla. Dans le camping, il y a une invasion, pacifique cette fois-ci, de campeurs teutons. L'ambiance est bon enfant entre les campeurs français et allemands. C'est l'occasion pour moi de sympathiser avec une jeune allemande, Doris et ses parents. Mes parents font la connaissance d'une famille de campeurs de Saint-Eloy-les-Mines avec lesquels ils garderont de bons contacts pendant plusieurs années. Ils ont deux enfants avec qui, bien sûr, nous faisons plus ample connaissance. Ma mère, au bout d'une semaine, se fatigue d'escalader la dune pour aller à la plage et mes parents decident de descendre encore plus au sud vers Biarritz ; la famille de Saint-Eloy nous suit et finit les vacances en notre compagnie : nous campons non plus dans un camping mais sur un terrain attenant à la colonie de vacances des Mines : à cette époque, avec un peu d'aplomb, on avait des vacances à pas cher...

 

Le château d'Ilbaritz près duquel nous avons campé en 1961 sur un terrain privé appartenant à une société qui exploitait une colonie de vacances.
passage de la frontière à ARNEGUY

Nous avons pour la première fois franchi les limites du territoire français pour aller voir la côte basque espagnole. Nous avons été surpris de découvrir à quel point à la fin des années cinquante beaucoup d'espagnols étaient misérables. Nous étions au plus fort de la période de l'Espagne traditionaliste et antimoderniste dirigée par le seul pouvoir du caudillo. Dans la gare même d'Hendaye des femmes et des enfants étaient pieds nus et en haillons ; maman avait l'impression d'être revenue vingt-cinq ans en arrière à l'époque de la guerre civile espagnole quand Trélazé accueillait des réfugiés qui venaient travailler dans les mines...

photo prise en 1961 du pont international d'Hendaye, frontière entre l'Espagne et la France.
 

Puis, nous avons quitté la côte basque pour rejoindre Lourdes vers le 15 Août avec les processions mariales, visité les grottes de Betharam et excursionné le cirque de Gavarnie, le pont d'Espagne...
 
Nous découvrions pour la première fois la haute montagne : des paysages d'une étonnante diversité dans une grande beauté, de sentiers escarpés en belvédères que les voyageurs gravissaient à dos de mulet.

genre de carte postale que l'on trouvait dans les bazars de l'époque : on tirait la languette blanche qui ouvrait le capot : un petit dépliant de photos s'ouvrait sur les grottes de Bétharam...


En 1962, nous partîmes toujours avec les B.... de St-Eloy-les-Mines, ensemble sur la Côte d'Azur en empruntant la fameuse nationale 7. Elle était fort encombrée. Ce voyage était franchement éprouvant pour les nerfs de papa qui n'arrêtait pas de s'éponger le front. Il a fallut donc avaler des centaines de kilomètres sur la nationale 7, traverser la Provence et les faubourgs de ... Il a fallut supporter papa qui s'énervait dans les bouchons et maman qui s'énervait après papa...


Enfin, nous arrivâmes dans la soirée à La Ciotat, nous avec la P60 et nos amis avec leur 4CV gonflée à bloc avec un chargement hétéroclite sur la galerie ; enfin, la nôtre aussi.
Nous nous installâmes dans un camping situé à la Ciotat, camping qui n'avait rien de pittoresque mais pour nous c'était déjà un enchantement : chaque jour, le soleil, la plage, une glace de temps en temps (nous découvrions les glaces à l'italienne) et, surtout, cet accent inimitable.



M
mon père et moi sur la Croisette à Cannes pendant les vacances de 1962 sur la côte d'Azur.




Un jour de ce mois d'août 1962, je découvris cependant le malheur des rapatriés d'Algérie.
Nous nous promenions sur le port de Marseille dont certains bateaux déversaient de ces malheureux. Beaucoup étaient perdus et je me souviens d'une femme qui pleurait sur un quai : on lui avait volé son seul bien qui lui restait, sa valise.

Le port de Marseille où je découvris en 1962 le désarroi des rapatriés vers la Métropole

Au bout d'une semaine à la Ciotat, nos parents voulurent changer de cadre et d'environnement car nous étions plutôt dans un quartier industriel que touristique. Nous partîmes explorer d'autres rivages ; mais, voilà, lors d'une traversée d'un carrefour dans la cohue des vacances, nous perdîmes toute trace de nos amis de St-Eloy. Il faut dire que le téléphone mobile n'avait pas encore pointé le moindre bout de museau et qu'il y avait du monde , même en 62... En désespoir de cause, nous avons installé notre campement à Fréjus, à la Tour de Mare et au bout d'une semaine, maman commença à s'inquiéter de la famille B... Elle réussit à obtenir l'adresse de leur point de chute auprès de leurs cousins restés en Auvergne et, rebelote, nous voici repartis les rejoindre. Ils avaient en fait, traverser le Var pour atterir à Mandelieu-la-Napoule près de Cannes, le long de la Siagne.

Nous avons quitté le Var pour les rejoindre. C'était, en réalité, un camping très bruyant avec beaucoup d'animations nocturnes et surtout infesté de moustiques. Maman ne tarda pas à regretter son camping de la Tour de Mare à Fréjus où nous avions fait la connaissance de belges sympathiques de Liège.

C'est durant les vacances à Mandelieu que nous découvrîmes l'existence de ces appareils de cuisson : les barbecue, un plaisir pour les propriétaires de ces grills de plein air mais un inconvénient pour le voisinage qui n'apprécie pas forcément les odeurs de fumée. J'appris en même temps, cette année-là, la mort de Marylin Monroe qui nous a tous bouleversés. Avant de repartir, nous avons pris la voiture pour longer la Corniche : la voie était encombrée de voitures décapotables de l'époque : des Versailles, des Floride, Caravelle au milieu des Cadillac. De Cannes à Monaco, nous découvrions que les palaces sont le front de mer de la Côte d'Azur, les falaises ouvragées de corniches, frontons et balustres et maman voulait surtout voir le rocher enchanté, le lieu de la rencontre entre le prince et la et starlette Grace Kelly. Mais n'est-il pas permis de rêver ?

Puis, mes parents décidèrent de lever le camp plus vite que prévu en direction du bercail par le chemin des écoliers : la route Napoléon à travers les champs de lavande.


Les vacances avec maman, cette année-là, se déroulèrent sans aucun problème il faut dire que je venais de passer avec succès l'examen du BEPC et mon frère également.

J'ai gardé un bon souvenir de cette dernière année scolaire au collège à TRELAZE, la classe de 3ème était une classe sympa et, à la fin avec quelques copines, nous allions réviser nos cours à la Dague (La Daguenière).


La Dague, c'était notre plage....
et, dès le retour des beaux jours, nous y allions à bicyclette. J'adorais l'été avec ses torpeurs, ses lenteurs, ses ennuis délicieux. Il me plaisait aussi de respirer par ces après-midi plombés de soleil l'odeur de vase qui se dégageait le long des bras de Loire quand celle-ci s'est retirée après les crues de l'hiver. Nous cheminions par les sentiers longeant les berges des "boires" peuplées de hérons cendrés qui s'envolaient, dès notre approche, d'un léger frémissement d'ailes. Il nous arrivait de traverser dangereusement la Loire pour nous réfugier dans les îles quand le niveau d'eau le permettait en narguant les bancs de sable mouvants. Mais c'était le bonheur d'avoir une plage à nous et le bonheur est fait de petits riens.




Toute une jeunesse plus ou moins vacancière s'y retrouvait, chahutait et se prélassait sur les longues grèves qui bordaient la moire mordorée du fleuve, le transistor à l'oreille ou tout simplement somnolant le livre de poche en main.

Et pourtant la Loire avait déjà fait des victimes et il nous était recommandé de ne pas nous y baigner mais certains et certaines bravaient l'interdit. Aujourd'hui le retour de la baignade en Loire n'est plus à l'ordre du jour compte-tenu des nombreux risques que présente le dernier fleuve sauvage d'Europe et si les baignades d'antan ne sont plus la nostalgie demeure...


 
A la Dague avec une copine.


Il nous est arrivé quelquefois depuis les années 2000 avec Gérard, mon mari qui partage avec moi cet amour pour le fleuve sauvage, d'aller pique-niquer le long de la Loire notamment dans le département voisin à St-Michel sur Loire en face de Bréhémont ou en Anjou, à Bouchemaine près d'Angers. Que c'est bon de profiter des belles journées d'été en écoutant le murmure des feuilles des peupliers sous la brise. Ce n'est pas grand chose mais ces heures passées dans la fraîcheur de l'ombre à savourer, enfin, quelques instants de calme et de repos sont les meilleurs souvenirs de ma vie. Quand je rentre à la maison, le soir, éblouie de toute cette lumière du ciel et de l'eau, je garde longtemps précieusement en moi le souvenir de ces journées peut-être parce qu'elles réveillent en moi certains souvenirs d'enfance.


 

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