vendredi 4 juillet 2008

A MES CHERS PETITS EMMA, ALEXIS, MATHILDE ET PAULINE












Sur cette photo, maman et moi nous passions près du Grand Cercle, bâtiment aujourd'hui disparu qui était situé le long du boulevard Foch à Angers et qui rappelait des souvenirs très émouvants à mes parents car ce bâtiment accueillait chaque jour au printemps 1945 les prisonniers de guerre à leur retour d’Allemagne. Mon père y fut donc accueilli à son retour de Rawa-Ruska en Juillet 1945 (il avait été libéré le 20 Mai 1945) et les personnes présentes lui chantèrent la Marseillaise qu'il réentendait enfin.

Un an, à peine, après le retour du prisonnier du Stalag VA matricule n° 29403, j'ai vu le jour à la maternité de l 'Hôpital d'Angers, le lundi de Pâques de l'an 1946. Mon père avait donc été fait prisonnier le 2 Juillet 1940 à Haguenau (Bas-Rhin) puis, interné ensuite dans le camp du Stalag VA à Ludivisbourg, près de Stuttgart où, après deux tentatives d'évasion, il fut finalement renvoyé au camp disciplinaire de Rawa-Ruska.* C'est donc libéré par les Russes qu'il est enfin rentré au foyer en Juillet 1945, très faible, malade.

C'est ce qui explique en partie la raison pour laquelle ma sœur et moi, car nous étions jumelles, sommes arrivées le 22 Avril 1946, de faible constitution. Ma sœur est morte le 29 Avril 1946, soit 7 jours après la naissance. Nous étions condamnées avant de naître et aux dires des personnes qui ont entouré maman pendant cette période dramatique, personne dans cette maternité ne s'accrochait à nos pauvres vies. Ma mère avait beaucoup mis en cause le personnel médical qu'elle jugeait inqualifiable, mais à leur corps défendant, il faut dire qu'il n'y avait pas de couveuse et que cet établissement était démuni de tout après la guerre. Les temps ont changé et celui-ci est maintenant de bon renom, il porte le nom de Maternité Robert Debré.

Ma mère est donc rentrée avec moi, et moi seule, à la maison, mais ses soucis au sujet de ma santé n'étaient pas pour autant terminés. Quand elle évoquait cette période dont elle éprouvait beaucoup de rancœur qu'elle ruminait souvent, elle donnait toujours la référence de mon poids à un mois : 1kg720.

Heureusement, la voisine de maman connaissait une sage-femme à Trélazé qui a eu la bonne idée de me pratiquer une transfusion du sang maternel ce qui m'a sauvée. Mes parents ont d'ailleurs gardé toute leur vie de très bonnes relations avec cette personne qui a présidé à la naissance de mon frère au domicile de mes parents, seize mois après, jour pour jour, le 22 Juillet 1947, en parfaite santé.



* Rawa-Ruska - Wikipédia En mars 1942, les autorités allemandes décidèrent de déporter à Rawa-Ruska, où se trouvait un camp transformé en camp de représailles (stalag n° 325) pour les prisonniers de guerre français qui avaient tenté de s'évader (évadés récidivistes) ou qui refusaient de travailler. Le premier convoi arriva à Rawa-Ruska le 13 Avril 1942. En juin 1942, les prisonniers français et belges étaient environ 10000 et l'on commença à les répartir dans les "sous-camps" créés dans la région ; en janvier 1943, les détenus dans les différents camps étaient au nombre de 24000 dont près de la moitié à Rawa-Ruska même.
Les conditions de vie étaient particulièrement dures en raison du climat d'abord (les températures de - 20° à - 30° étaient fréquentes l'hiver et la chaleur était torride en été), d'une nourriture insuffisante et du travail forcé auquel étaient contraints les prisonniers. A Rawa-Ruska, les robinets d'eau étaient rares et bien insuffisants pour quelques 10000 hommes ce qui devait amener ultérieurement Wiston Churchill à décrire dans un discours le camp de Rawa-Ruska comme celui "de la goutte d'eau et de la mort lente".
Dans une lettre édifiante au Procureur Général du procès de Nuremberg, le chef du camp, le lieutenant-colonel Bork, peu avant son exécution, écrivait ceci : "Rawa-Ruska restera mon oeuvre, j'en revendique hautement la création, et si j'avais eu le temps de la parachever, aucun Français n'en serait sorti vivant. Car je peux bien le dire maintenant que je vais mourir, j'avais reçu des ordres secrets de Himmler d'anéantir tous les terroristes français".
Devant l'avance de l'Armée Rouge, Rawa-Ruska fut abandonné par les prisonniers le 19 Janvier 1943 et ses occupants transférés par les Allemands dans divers camps. Ceux que l'Armée Rouge libéra furent retenus jusqu'à ce qu'ils puissent être rapatriés en France et en Belgique le 2 Juillet 1945.

Rawa Ruska se situe aujourd'hui en Ukraine alors que jusqu'en 1939, cette ville était polonaise. En septembre 1939, la Pologne étant envahie par l'Allemagne, Rawa-Ruska fut annexée par les Russes et en juin 1941, dès le début de l'invasion de l'Union Soviétique par les nazis, elle fut occupée par l'armée allemande. 

Donc, grâce aux soldats de l'Armée Rouge, les prisonniers de guerre français dont mon père qui avaient été détenus dans le camp de représailles de Rawa-Ruska purent regagner leur foyer en Juillet 1945. A son retour, mon père fut admis durant l'été 1945 dans un hôpital qui avait été installé près du camp d'aviation, à la sortie nord d'Angers.




Toute la famille pose devant le Grand Cercle démoli en 1961.







2 commentaires:

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